HPI : halte aux idées reçues
sur les hauts potentiels intellectuels !
Les surdoués sont tous hypersensibles et en échec scolaire ? Pas si sûr. Bien que certains se sentent en décalage avec les autres et peuvent avoir des problèmes relationnels, beaucoup le vivent très bien.
L’intelligence hors norme fascine. La série HPI, dans laquelle une femme de ménage au QI de 160 aide la police à résoudre des enquêtes, rencontre un franc succès sur TF1. Et un chercheur américain s’est amusé à estimer le QI de scientifiques et d’artistes comme Copernic, Beethoven ou Léonard de Vinci à partir de leurs écrits et biographies (c’est, d’après ses calculs, Leibniz et Goethe qui détiennent le record avec 190 !). Pour désigner les individus plus brillants que les autres, la terminologie a évolué : « surdoué » après la Seconde Guerre mondiale, « enfant intellectuellement précoce » au sein de l’Éducation nationale depuis 2000 et même « zèbre », selon Jeanne Siaud-Facchin, auteure du best-seller Trop intelligent pour être heureux? en 2008 (éd. Odile Jacob). Désormais les spécialistes parlent de haut potentiel intellectuel (HPI) ou haut quotient intellectuel (HQI). Mais malgré la progression de la recherche, les clichés persistent.
Le Haut Potentiel Intellectuel a forcément un QI supérieur à 130
Vrai et faux « L’intelligence, c’est trier, cueillir, décider (legere en latin), parmi (inter) un ensemble de choses, rappelle Fanny Nusbaum, psychologue clinicienne et chercheuse en psychologie et neurosciences. L’intelligence n’est donc pas une capacité, c’est un état. » Si pour elle, un clinicien est capable de déceler une intelligence supérieure en observant une personne qui « réfléchit tout le temps » – comme on constaterait qu’une personne est sportive parce qu’elle fait du sport –, la mesure de l’intelligence par un test s’est imposée au cours du XXe siècle. « Un HPI a un quotient intellectuel (QI) supérieur à 130. Et c’est tout », définit Corentin Gonthier, maître de conférences à Rennes II (Ille-et-Vilaine) et spécialiste de la cognition de haut niveau. C’est la définition la plus commune, mais dans la recherche les auteurs choisissent parfois un autre seuil (120) ou ajoutent des éléments pour caractériser un HPI, la créativité par exemple.
Il est possible de les détecter à certains signes précoces
Vrai Un faisceau d’indices aide à repérer les enfants à haut potentiel. « Il faut qu’ils pensent et qu’ils comprennent. Souvent, ils parlent tôt et bien, ils posent des questions métaphysiques, ils s’intéressent à des sujets complexes et variés », a constaté Dominique Sappey-Marinier, enseignant-chercheur en neurosciences. « Attention, tempère la spécialiste en neuropsychologie Confidences de psy, qui vulgarise ces questions sur Instagram. Tous les enfants parlant tôt ne sont pas nécessairement HPI. » Certains prennent même le contre-pied : « Einstein n’aurait parlé qu’à partir de 4 ans », souligne Fanny Nussbaum. Quant aux HPI adultes qui s’ignorent, ils font fréquemment la démarche de passer un test quand leur enfant est détecté.
Un HPI a forcément des problèmes à l’école
Faux Parmi les enfants intellectuellement précoces, « un tiers sont en situation d’échec scolaire relatif ou massif », affirmait le site de l’académie de Bordeaux en janvier 2022. Un cliché difficile à désamorcer. Certes, des élèves rencontrent des difficultés mais, en moyenne, un QI élevé donne plus de chances pour réussir. Les preuves foisonnent. Par exemple, selon une étude française publiée dans Intelligence en 2018, les élèves HPI obtiennent en moyenne 2,6 points de plus au brevet des collèges que les autres, et seuls 1,66% échouent (contre 15,5% au niveau national). En outre, ils redoublent moins, sautent plus de classes, etc. D’où vient alors ce mythe tenace ? « C’est lucratif pour les psys et, pour les parents, se dire que l’échec scolaire est imputable à un haut potentiel est rassurant», analyse Emmanuelle Piquet, thérapeute et auteure de nombreux ouvrages sur le harcèlement en milieu scolaire.
Par ailleurs, seuls les enfants en difficulté consultent, ce qui crée un biais de perception. Toutefois Fanny Nusbaum et Dominique Sappey-Marinier distinguent les HPI homogènes (ou laminaires) et les HPI hétérogènes (ou complexes). Selon eux, les laminaires réussissent de manière homogène les quatre sections des tests de QI (verbal, spatial, rapidité et mémoire). « Ce sont les premiers de la classe», résume le chercheur. Les complexes, eux, obtiennent des résultats hétérogènes au test, avec par exemple un excellent score en verbal (vocabulaire…) mais moins bon en rapidité. Ils suivent un chemin de pensée plus compliqué pour parvenir à un résultat et ne savent pas l’expliquer. « Ils ont davantage de difficultés d’attention ou d’apprentissage que les laminaires.» Chez les adultes, là encore, le QI prédestine à la réussite professionnelle, qu’elle soit mesurée par le salaire, le statut social, la performance et même la satisfaction au travail (dans une moindre mesure).
[…]
Article écrit par Audrey Chabal, à retrouver en entier sur : https://www.caminteresse.fr/