La série Aspergirl résonne avec ma propre vie de femme autiste

« J’attendais beaucoup de cette série »

À travers ce témoignage, Numerama donne la parole à Mélanie Fazi. Comme l’héroïne de la série Aspergirl (avec Nicole Ferroni sur OCS), elle a reçu un diagnostic tardif de son autisme, une expérience qu’elle détaille dans son livre L’année suspendue. Elle nous raconte son ressenti en regardant Aspergirl. Entre bonne représentation et quelques clichés persistants, elle se dit en tout cas « reconnaissante » envers cette série.

Si les femmes autistes, longtemps oubliées à l’écran, se sont vu depuis peu consacrer des séries comme Astrid et Raphaëlle (France 2) ou Extraordinary Attorney Woo (Netflix), le cas de figure des femmes diagnostiquées adultes n’y avait, me semble-t-il, pas encore été abordé.

En raison de la méconnaissance générale autour de l’autisme, de profils souvent plus discrets et d’une tendance à recourir au « camouflage social » pour nous faire accepter des autres, nous sommes nombreuses à être passées sous le radar jusqu’à l’âge adulte, au prix d’un parcours de vie souvent chaotique et douloureux. Certaines découvrent être autistes au hasard d’un article lu sur Internet, d’autres après le diagnostic de leurs enfants, comme c’est le cas de Louison et de son fils Guilhem dans la série Aspergirl.

« Diagnostiquée moi-même à 43 ans, j’attendais beaucoup de cette série, la première à représenter un parcours proche du mien. »

Mélanie Fazi

Diagnostiquée moi-même à 43 ans, j’attendais beaucoup de cette série, la première à représenter un parcours proche du mien. Même si, comme beaucoup, j’avais tiqué sur la maladresse du titre choisi : non seulement l’expression « syndrome d’Asperger » est obsolète, mais la communauté autiste ne souhaite plus être associée à Hans Asperger, personnage trouble connu pour ses liens avec le nazisme. Un faux pas regrettable dans le cadre d’une série dont l’équipe créative — les scénaristes Judith Godinot et Hadrien Cousin et la réalisatrice Lola Roqueplo — ont manifestement pris la peine de se renseigner, prenant notamment conseil auprès de personnes concernées. Julie Dachez, l’une des principales figures médiatiques françaises de l’autisme au féminin, a également servi de consultante sur le scénario.

Le premier épisode, malgré quelques maladresses, m’a plutôt emballée. Là où des personnages comme Astrid Nielsen ou Woo Young-Woo, diagnostiqués dans l’enfance, rencontrent des difficultés très différentes des miennes, l’expérience de Louison se rapproche beaucoup plus de ce que je connais.

J’ai été immédiatement séduite par l’interprétation de Nicole Ferroni, qui rend de manière convaincante la gestuelle de Louison, son désarroi face à un monde difficile à décrypter, l’hésitation qui la paralyse dans les situations imprévues, sa manière de digresser pour suivre le fil de ses pensées, jusqu’à sa façon de jouer nerveusement avec ses doigts qui me rappelle la mienne.

3 scènes d’Aspergirl qui ont résonné avec ma propre vie

Trois scènes ont résonné très fort avec ma propre vie dans cet épisode :

  • Ce coup de fil pour lequel Louison, peu à l’aise avec l’exercice, prépare à l’avance les phrases qu’elle va prononcer ;
  • la façon dont elle s’immerge dans sa bulle de musique grâce à son casque à réduction de bruit et s’abandonne tout entière à l’euphorie, comme si le regard des autres n’existait plus ;
  • et surtout la scène où la psychologue lui annonce soupçonner chez elle des traits autistiques.

« Un moment d’une grande finesse qui a remué des souvenirs et m’a fait venir les larmes aux yeux. »

Mélanie Fazi

Une série d’expressions très justes passe sur son visage, une forme de stupéfaction mais aussi de la joie, du soulagement, une impression d’évidence alors qu’elle pense sans doute à toutes ces questions sans réponses qui viennent soudain d’en trouver une. Le choc viendra plus tard mais pour l’heure tout s’éclaire, dans sa tête comme sur son visage. Un moment d’une grande finesse qui a remué des souvenirs et m’a fait venir les larmes aux yeux.

J’ai simplement regretté que la démarche de diagnostic paraisse si facile à l’écran quand il s’agit en réalité d’un vrai parcours du combattant.

Un quotidien atypique

Le jeune Carel Brown, qui interprète Guilhem,…

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Article écrit par Mélanie Fazi à retrouver en entier sur : www.numerama.com